Issu d’une famille bourgeoise de Saint- Hilaire-de-la Côte (Isère), Louis-Joseph Jay a le don de l’éloquence. Artiste, il est professeur de dessin à Montpellier pendant douze ans. On ne sait rien de ses relations avec sa famille et peu de ses oeuvres subsistent au musée de Grenoble.
Ses convictions jacobines le ramènent en Isère en 1795 où il installe son atelier de peinture à Grenoble. Il est bien accueilli par les Grenoblois majoritairement républicains. Un an après son arrivée, il est nommé Commissaire en charge d’inventorier les objets d’art de dépôts constitués de saisies révolutionnaires.
En effet, l’Assemblée constituante, ayant pris conscience de la nécessité de conserver les oeuvres d’art, avait créé une commission pour inventorier les monuments et les oeuvres d’art nationalisés. Il s’agissait aussi de protéger les objets qui n’avaient pas été vandalisés en les déposant dans d’anciens couvents après la confiscation des biens du clergé en 1792.
Cours de paysage
Pendant le Directoire (1795-1799), les écoles centrales, libres et laïques, ouvertes à toutes les couches de la société sont créées afin de remplacer les collèges auparavant tenus par des religieux et assurant la formation des élèves issus de la noblesse ou de la bourgeoisie.
En 1796, Louis-Joseph Jay est l’un des neuf professeurs de l’École Centrale de Grenoble dont un membre du jury n’est autre que le docteur Gagnon, grandpère de Stendhal. Louis-Joseph Jay est envoyé à Paris pour rapporter à Grenoble des oeuvres et des moulages pour servir de modèles. Puis il est envoyé en tant qu’expert auprès des commissaires du Directoire dans une Italie en guerre où le général Bonaparte libérait les peuples de l’Italie de l’emprise des Autrichiens.
De ce voyage il rapporte 58 tableaux et 195 dessins pour servir sa pédagogie. Ses cours réunissent le plus grand nombre d’élèves. Il innove en proposant un cours de paysage où il engage ses élèves à travailler sur le vif. Stendhal et Champollion compteront parmi ses élèves. En 1797, soutenu par les membres du Lycée des Sciences et des Arts, une société savante, il lance deux pétitions en faveur d’un musée idéal et convainc les administrateurs du département.
Éviction et destitution
En 1798, le musée est créé à titre provisoire, et le citoyen Louis-Joseph Jay nommé conservateur. Le coup d’État de Napoléon Bonaparte du 9 novembre 1799 instaure le Consulat. Malgré de nombreux obstacles, l’arrêté de création du Musée de Grenoble est approuvé en avril 1800 et Grenoble reçoit une première dotation de tableaux de l’État.
Louis-Joseph Jay subira de nombreux déboires à cause des changements politiques et des guerres visant à la restauration de la monarchie, mais il travaillera sans relâche à la constitution des collections du musée. Il sera évincé de ses cours en 1807, puis en 1815, lors de la restauration, destitué de ses fonctions de conservateur par le maire ultra de Grenoble, favorable à Louis XVIII. Il terminera sa vie dans la pauvreté pour avoir toujours affirmé ses convictions politiques.
Un roman historique sur Louis-Joseph Jay
En 2020, Béatrice Besse, passionnée par l'histoire de Grenoble, illustratrice et autrice de romans historiques, a publié Guidé par le Beau idéal, Louis-Joseph Jay aux éditions Stellamaris. Grâce à des recherches fouillées, elle reconstitue la vie et le parcours de Louis-Joseph Jay, et montre de façon romancée comment une histoire individuelle se trouve confrontée et mêlée à l'Histoire durant une période troublée où les guerres et les changements de régimes sont fréquents.