Vous coprésidez l'Ordre de la Libération : comment cette période de l'histoire nous inspirera-t-elle ce printemps ?
En tant que maire de Grenoble, j'ai la fierté de coprésider l'Ordre de la Libération en cette année 2024 au côté du général Baptiste. Notre ville a rassemblé un concentré de courages qui ont participé pleinement à la libération de notre territoire. Ce sera cette valeur qui animera le spectacle du Centre Chorégraphique National de Grenoble Parades et Désobéissances qui se jouera le 15 juin au Palais des Sports. Ce sont tous les courages qu'il convient de célébrer, y compris ceux qui ont été invisibilisés jusqu'aujourd'hui : les femmes, les personnes étrangères qui ont grossi les troupes des FTP-MOI dont Missak et Mélinée Manouchian ont fait partie, les tirailleurs sénégalais à qui nous rendons hommage en mars. Car en ces temps troublés, il importe de rappeler le rôle des personnes étrangères dans la construction de notre récit commun. Rappelons également que la construction européenne a été un facteur de liberté et de paix, et un mot d'ordre unificateur pour les pays qui y ont contribué. Résister, transmettre, c'est aussi prévenir le repli sur soi et la peur de l'autre.
Comment y remédier à Grenoble ?
Nous devons nous employer à faire tenir la société ensemble. Nous accompagnons, organisons des manifestations qui permettent de s'ouvrir à d'autres univers : Détours de Babel, qui rassemble des musiques des cinq continents, le Printemps du Livre, qui donne à chaque Grenobloise et à chaque Grenoblois un accès aux écrivain-es, leur vécu et leur imaginaire. Mais la construction de la ville participe, elle aussi, à créer le lien. Ainsi, le pôle enfance Les Trembles, situé à La Villeneuve, le plus important quartier populaire de l'agglomération, permettra aux parents, aux bébés, aux enfants et aux personnes aimant le sport de se côtoyer dans un ensemble rénové de manière écologique avec de la paille et du bois venus d'Isère et de Chartreuse. Car oui, un urbanisme de la relation, un urbanisme qui lutte contre la solitude et le repli sur soi, c'est celui qui favorise le bien-être, les rencontres et l'accès à la nature pour toutes et pour tous. À Grenoble, c'est une démarche de longue date.
Des exemples ?
La tour Perret et le téléphérique de Grenoble. Ces deux infrastructures aujourd'hui emblématiques de notre ville ont été construites à l'époque de mon prédécesseur, Paul Mistral, chantre du socialisme municipal, à l'heure où les congés payés n'avaient pas encore été institués. La tour Perret, qui est désormais en chantier dans la perspective de sa réouverture future au public, était initialement «la tour pour observer les montagnes» et permettait à quiconque de pouvoir se projeter en montagne. Cette année, nous célébrons aussi les 90 ans du téléphérique de Grenoble, trait d'union plus direct vers les montagnes, qui dès 1934 a permis à quiconque d'accéder au site de la Bastille et de prendre de la hauteur. Ces deux monuments symbolisent notre ville à double titre : ils sont emblématiques de notre volonté d'innover, et de notre souhait de rendre les montagnes si voisines connues de toutes et de tous.