Comment notre société aborde-t-elle la question de vieillissement ?
Elle en fait un objet de terreur ! En France, l’espérance de vie a beaucoup progressé. On vit mieux et plus longtemps, mais on ne parle que de catastrophe démographique : « que va-t-on faire de tous ces vieux ? », « ça va nous coûter une fortune ! ». Pourtant, les plus de 75 ans ne représentent que 10 % de la population et parmi eux plus des deux-tiers ne sont pas en situation de dépendance. Néanmoins, l’âgisme est très présent car dans notre monde capitaliste, les personnes retraitées sont vues comme des personnes qui ne sont plus productives et deviennent un poids financier.
Vieillit-on tous et toutes de la même façon ?
Non, car le vieillissement n’échappe pas aux inégalités. Les personnes qui vieillissent mal sont les précaires : si vous avez été mal logé-e, mal soigné-e, si vous avez eu un métier difficile, vous êtes prédisposé-e à être en perte d’autonomie. Par ailleurs, la dépendance et la grande vieillesse sont liées au genre : les Ehpad accueillent 90 % de femmes et il y a six fois plus de femmes centenaires que d’hommes. Elles vivent plus longtemps mais souvent dans la précarité car leurs pensions sont inférieures de 30 % à celles des hommes, en mauvaise santé en raison de leur place dans une société où elles cumulent travail, tâches ménagères, charge mentale… Et souvent isolées suite au décès de leur conjoint puisque les hommes vivent moins longtemps.
Comment lutter contre cet isolement des aîné-es ?
Il est important de réconcilier les générations en créant des occasions d’échanges pour montrer que chacune et chacun a des choses à apporter aux autres : son expérience, ses compétences… Et ainsi dépasser les clichés : « les jeunes ne veulent plus travailler », « les seniors sont inutiles », etc. Il faut donc miser sur la capacité de se côtoyer et de s’écouter dans la bienveillance !
Pour cela, quelles initiatives peuvent être pertinentes ?
L’habitat inclusif est une bonne illustration puisqu’il permet à différentes générations de vivre ensemble. Aujourd’hui, ces nouveaux modes de sociabilité se développent, ce qui est positif car ils sont représentatifs de ce que devrait être la vie en société. Ils sont le plus souvent portés par des démarches associatives ou citoyennes, des gens de terrain qui apportent des réponses concrètes aux besoins spécifiques des territoires, alors que les politiques publiques sont beaucoup plus générales et normatives.
Les aidant-es jouent aussi un rôle majeur dans le bien vieillir…
Absolument ! Si les personnes âgées peuvent rester chez elles, c’est parce qu’en moyenne, la famille apporte une aide informelle trois fois supérieure à celle des professionnel-les en matière de temps consacré. Ceci car les pouvoirs publics ne sont pas à la hauteur de l’accompagnement : on manque de professionnel-les et on n’engage pas de nouvelles formations pour faire des économies. Mais c’est un calcul à courte vue car pour les aidant-es, qui sont souvent les seniors de demain, cela entraîne du stress, du surmenage… Autant de difficultés qui auront des répercussions sur leur santé future.
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