L’égalité commence-t-elle par l’assiette ?
L’égalité commence bien avant l’assiette ! Si on se place dans le domaine de l’alimentation, l’égalité peut être évaluée aux différentes étapes de la chaîne alimentaire, des champs à l’assiette, soit de la production à la consommation, avec entre les deux, la transformation des produits alimentaires et leur distribution. Aujourd’hui, près de 18 % des agriculteurs et des agricultrices vivent très largement sous le seuil de pauvreté. Les politiques publiques devraient pouvoir répondre à ces problèmes majeurs – à commencer par celui de la santé et de l’environnement, alors que les dernières lois, et notamment la loi Duplomb, vont totalement à l’opposé de la revalorisation qualitative de la production alimentaire.
En quoi l’alimentation nous relie-t-elle les un-es aux autres ?
L’alimentation implique toutes les institutions, qu’elles soient économiques, politiques, culturelles, religieuses, symboliques… Manger nous inscrit dans une culture partagée, avec nos familles, nos ami-es, nos voisins et voisines. Mais l’alimentation peut aussi être une des causes de certaines formes de marginalisation, quand nos pratiques culinaires sont dévalorisées, peu reconnues, ou qu’il est difficile d’accéder à des produits connus, par exemple. Pour les personnes précaires, isolées, partager des repas, faire la cuisine ensemble permet de retrouver des liens sociaux.
Quelle vision avez-vous du paysage agroalimentaire de la région grenobloise ?
Les collectivités s’organisent et s’engagent autour d’un Projet Alimentaire Inter-territorial (PAIT) depuis 2020, mais collaboraient déjà avant. Le PAIT devrait leur permettre de mieux coordonner leurs actions dans ce domaine. Le territoire peut compter sur un réseau important de structures, d’associations et de comités citoyens qui œuvrent, mais avec trop peu de moyens, pour lutter contre les inégalités d’accès aux terres agricoles et à l’alimentation. Une caractéristique importante du territoire est la dynamique de développement des circuits courts, qui permettent des modes de production et de commercialisation garantissant de meilleurs revenus aux producteurs et productrices. Pour autant, l’autonomie alimentaire du territoire est estimée à moins de 40 % — qui le rend donc fortement dépendant. Elle doit être pensée à une échelle plus grande ! Le territoire a des marges de progrès potentiels importantes, à condition de réfléchir sur les types de production à développer…
Que sait-on de l’évolution des pratiques agricoles et alimentaires sur le territoire ?
Grâce aux données récoltées par l’Agence d’Urbanisme de la Grande Région Grenobloise, on sait que la surface agricole utile (SAU) du territoire est stable. En revanche, le nombre d’exploitations baisse et leur taille augmente, ce qui pose des enjeux cruciaux de transmission, d’autant que la pression foncière est forte. Autrefois surtout dédiée à l’élevage bovin, l’agriculture s’est diversifiée. En 2022, 16 % des exploitations étaient en polyculture et/ou polyélevage, mais avec peu de production de fruits, hormis les fruits à coque : les noix occupent une part très importante, représentant plus de 1 000 % d’autonomie, donc 10 fois supérieure aux besoins du territoire, les noyers constituant 97 % des vergers du territoire du PAIT et environ 1/3 des noyers du pays ! En dix ans, le nombre d’exploitations bio a été multiplié par deux (23,5 % des structures).
Enfin, l’utilisation de produits phytosanitaires est plus faible que sur le reste de la France, et tend à diminuer encore. Quant à la population du territoire du PAIT, elle est bien plus jeune que la moyenne française, se compose de plus de catégories socioprofessionnelles supérieures, et connaît de fortes inégalités de revenus, qui pèsent évidemment sur les modes et les choix de consommation et sur l’accès à une alimentation de qualité. Sur le territoire de l’agglomération, 20 % des habitant-es déclarent s’être déjà restreint-es sur les dépenses alimentaires.
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